Lettre ouverte à MM. Beretz et Tock concernant « l'affaire Vemma » et les élections au Conseil d'UFR des sciences historiques.
Publié le 14 Avril 2014
Strasbourg, le lundi 14 avril 2014
À l’attention de MM. Alain BERETZ, président de l’Université de Strasbourg ; Benoît-Michel TOCK, directeur de l’UFR de sciences historiques et Mme Blandine LYSENSOONE, présidente de l’Association des Étudiants en Sciences Historiques de Strasbourg.
Madame, messieurs,
À la lecture de l’article « Vemma, réseau de vente suspect, s’infiltre chez les étudiants » publié par le journal en ligne Rue89 Strasbourg le 10 avril dernier (1), nous restons perplexes devant cet afflux d’informations aberrantes. Néanmoins nous n’en sommes absolument pas surpris. Nous étudiants au Palais Universitaire avons subis des jours durant le déferlement du prosélytisme acharné de personnes commanditées par Vemma, société américaine vendant des boissons énergisantes (2), qui vantaient les « opportunités incroyables » - mensongères - pouvant s’ouvrir à nous si nous collaborions avec eux, à grand renfort de tracts distribués au gré de leurs pérégrinations hors et dans le Palais Universitaire. Comme il était stipulé sur leurs tracts, ces personnes organisaient une « conférence » salle 119 au Palais universitaire le mardi 25 mars 2014 à 19h (3). Une question s’est naturellement posée à nous comme à beaucoup d’étudiants de notre établissement : comment une telle organisation a pu disposer aussi facilement d’une salle à l’Université de Strasbourg ? Nous occultons la question liée : pourquoi nous étudiants en sciences historiques n’avons pas le droit à des salles à la capacité adaptée pour nos cours ? Passons. Les éléments de réponse apportés par l’article de Rue89 Strasbourg en précisant que la réservation a été faite au nom de la présidente de l’AESH (4), ont été démentis rapidement par l’association. Nous n’accusons absolument pas ces derniers, et souhaitons autant qu’eux que des éclaircissements soient apportés. En revanche nous souhaitons que toute la lumière soit faite sur la manière dont ces personnes dépendantes d’une société crapuleuse ont pu réserver une salle à l’Université de Strasbourg, et de quelle manière l’AESH a été mêlée à cette affaire. De même que cela se fasse de manière publique et officielle serait souhaitable, tant par l’AESH que par M. Beretz lui-même puisque comme le stipule le règlement intérieur de l’Université de Strasbourg : « L’affectation des locaux relève de la compétence exclusive du président de l’université. » (5)
L’article de Rue89 Strasbourg développe clairement le fait que cette société use de procédés frauduleux, voire illégaux tels que le système de vente pyramidal, interdit en France depuis les lois de 1953 et de 1995 sur les ventes ou prestations « à la boule de neige » (6). Nous ajoutons aux griefs avancés par Rue89 Strasbourg la récente condamnation de la branche italienne de la société Vemma à 100 000 € d’amende pour pratique illégale de la vente pyramidale (7). De la même manière que nous ne voulons pas voir les journaux des réactionnaires monarchistes de l’Action française universitaire souiller notre Palais Universitaire, nous ne voulons pas qu’une société d’escrocs vienne recruter sur les bancs de notre établissement.
Ainsi nous souhaitons avoir plusieurs explications sur cette affaire : comme nous l’avons mentionné ci-dessus, comment Vemma Strasbourg (8) a pu obtenir une salle aussi facilement auprès de l’Université de Strasbourg ? Et de quelle manière l’AESH a-t-elle été mêlée à cette affaire ?
De plus, comment se fait-il que les personnes commandités par Vemma ont-ils pu réaliser la promotion de leur système frauduleux à l’intérieur du Palais Universitaire sans être inquiétées ?
À plusieurs reprises, nous militants à l’Union des Étudiants Communistes de Strasbourg nous sommes vu refuser l’autorisation de distribuer nos tracts d’information dans le hall du Palais Universitaire et éconduits à l’extérieur du bâtiment. Nous vous rappelons à ce titre le Code de l’éducation : « Ils [les usagers du service public de l'enseignement supérieur] disposent de la liberté d'information et d'expression à l'égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels. Ils exercent cette liberté à titre individuel et collectif, dans des conditions qui ne portent pas atteinte aux activités d'enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l'ordre public. » (9) Il ne nous semble qu’à aucun moment nous n’avons porté atteinte ni aux activités d’enseignement, ni à l’ordre public. Nous exigeons donc des explications à ce sujet. Mais là également nous ne sommes pas surpris, la charge des gendarmes mobiles menée par le commissaire de police lui-même qui n’a pas rechigné à mettre la « main à la pâte étudiante » le 30 janvier sur le rassemblement pacifique des étudiants devant le Palais Universitaire, ainsi que l’arrestation et la mise en garde à vue de deux de nos camarades pour des motifs ubuesques, nous ont bien fait voir de quelle manière l’on traite les étudiants, surtout ceux qui s’élèvent contre l’austérité budgétaire organisée. Vaut-il mieux être en notre Université une entreprise de ploutocrates voleurs comme Vemma qu’une organisation politique progressiste qui se bat pour le droit des étudiants ? Nous sommes réellement sidérés par tant de mépris.
Nous profitons également de cette tribune pour exprimer notre inquiétude à propos de l’organisation des élections au Conseil d’UFR des sciences historiques du 25 et 26 mars 2014. En effet plusieurs irrégularités sont venues entacher ce scrutin. Nous pouvons notamment citer l’absence de l’affichage des listes présentées aux élections du collège des étudiants, ce qui aurait du être réalisé le 21 mars comme précisé par l’Arrêté du directeur de la faculté des sciences historiques (10). Ce fait a été rapporté au directeur de l’UFR qui a rétorqué « qu’il aurait fallu lui rappeler plus tôt (!) ». Admettez tout de même que c’est un comble pour la personne qui est sensée avoir approuvé et signé cet Arrêté. Ajoutons également « l’omission » de la mention de l’heure exacte du dépouillement de ces élections sur l’Arrêté. De plus à de nombreuses reprises les candidats des listes « Historiens progressistes » se sont vus empêchés de réaliser des interventions lors des cours pour inviter les étudiants à voter et réprimandés en vertu d’un certain règlement. Il leur a été également interdit de militer à l’intérieur du Palais Universitaire le mardi 25 et le mercredi 26 mars - c’est-à-dire les jours où se déroulaient les élections -, par la justification suivante : le Palais Universitaire représente dans sa totalité le bureau de vote, et non la salle 141 uniquement, donc il est interdit de faire de la « propagande » dans le bureau de vote. Nous avons essayé de glisser notre bulletin de vote sous les lourdes portes du Palais Universitaire - comme celui-ci était considéré comme bureau de vote dans son intégralité - mais malheureusement il ne semble pas que nos voix aient été comptabilisées.
Par conséquent nous voudrions connaître ce fameux règlement, et les « textes en vigueur » mentionnés dans les statuts de l’UFR des sciences historiques (11), lesquels nous ont été avancés pour nous empêcher d’informer les étudiants, et alors nous admettrons nos torts.
Malheureusement il n’existe pas de lois punissant le déni de démocratie et le déficit d’information concernant les élections au Conseil d’UFR, sinon notre UFR des sciences historiques aurait été lourdement condamné. Vous admettrez qu’un mail envoyé à l’attention des étudiants le 12 février 2014 en guise d’unique information concernant ces élections cela est bien trop peu, et nous le regrettons fortement.
En souhaitant que des actes soient associés à votre future réponse,
Bien cordialement,
Les communistes du Palais Universitaire.
Notes :
(1) « Vemma, réseau de vente suspect, s’infiltre chez les étudiants » dans Rue89 Strasbourg, 10 avril 2014. http://www.rue89strasbourg.com/index.php/2014/04/10/societe/vemma-vente-reseau-etudiants/
(3) Comme il est également stipulé sur l’événement Facebook créé pour l’occasion, toujours visible à l’adresse : http://www.facebook.com/events/598466756895889/
(4) Association des étudiants en sciences historiques de Strasbourg
(5) Article 4 du Règlement intérieur de l’Université de Strasbourg. http://psychologie.unistra.fr/wp-content/uploads/2012/10/Reglement_interieur_UdS_042.pdf
(6) Articles L122-6 et L122-7 du Code la consommation. http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=29B1E140FF1C34E39741E5A29C2FEF62.tpdjo07v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006161832&cidTexte=LEGITEXT000006069565&dateTexte=20100930
(7) « Vendite piramidali, Antitrust sanziona tre società per 500 mila euro » dans Help Consumatori, 10 mars 2014. http://www.helpconsumatori.it/acquisti/vendite-piramidali-antitrust-decide-multe-per-500-mila-euro
(8) Voir leur page Facebook : http://www.facebook.com/pages/Vemma-Strasbourg/230540463774555?fref=ts
(9) Article L811-1 du Code l’éducation. http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=29B1E140FF1C34E39741E5A29C2FEF62.tpdjo07v_3?idArticle=LEGIARTI000027748009&cidTexte=LEGITEXT000006071191&dateTexte=20140411
(10) Article 3 de l’Arrêté du directeur de la faculté des sciences historiques. http://histoire.unistra.fr/fileadmin/upload/DUN/sciences_historiques/C.Favier/Arrete_Directeur.pdf
(11) Article 5 des Statuts de la faculté des sciences historiques. http://histoire.unistra.fr/uploads/media/Statuts_Sciences_historiques.pdf