Sur l’affaire du Christkindelsmärik : fascisme VS fascisme dans le Marché de Noël consumériste

Publié le 15 Décembre 2016

Sur l’affaire du Christkindelsmärik : fascisme VS fascisme dans le Marché de Noël consumériste

Depuis quelques jours, une polémique a envahi les réseaux sociaux et les médias alsaciens : pour les éditions 2015 et 2016 du Marché de Noël, la ville de Strasbourg a retiré l’arche traditionnelle du Christkindelsmärik (« Marché de l’enfant Jésus ») à l’entrée du site de place Broglie. A l’origine de la polémique, les identitaires et fascistes alsaciens ont dénoncé cela comme preuve que la municipalité ne veut pas choquer la communauté musulmane. Ils accusent la ville de Strasbourg de trahir les traditions ainsi que l’identité alsacienne. La réponse de Roland Ries, maire de Strasbourg, ne s’est pas faite attendre : l’arche aurait été retirée non pas pour des motivations religieuses, mais pour des questions de sécurité liées à la tenue du Marché de Noël sous l’état d’urgence[1].

La dynamique de cette querelle est bien claire. D’un côté, nous avons la dérive fascisante de l’Etat français à l’heure de l’état d’urgence, qui militarise ses lieux publics pour donner un faux-semblant de sécurité à la population et permettre aux touristes de se sentir protégés pour consommer. De l’autre côté, nous avons les groupuscules identitaires et fascistes qui se plaignent des conséquences de cette dérive autoritaire (que soutiennent, pourtant) mais se trompent volontairement d’analyse, en profitant pour propager l’islamophobie.

L’objectif des groupes fascistes est atteint une fois de plus : le débat sur la militarisation absurde de la ville pendant le Marché de Noël est détourné en faveur du débat sur le respect des traditions et de l’identité régionale. Comme d’habitude, « Quand le sage désigne la lune, le fasciste regarde le doigt ».  Et cela convient certainement à la municipalité, puisque au lieu d’être mise face à ses responsabilités sur la militarisation du centre-ville (qui a déjà causé nombre de bavures[2]) ou sur l’exclusion sociale en période hivernale[3], elle se retrouve à affronter un faux débat sur l’identité alsacienne et peut répondre s’appuyant sur des arguments pragmatiques de gestion de la circulation et des espaces publics. Par ailleurs, et cela n’est pas étonannt, les fascistes ne se rendent pas compte de la contradiction manifeste de leur discours : ils dénoncent le fait que Ries se serait agenouillé et jouerait le jeu des musulmans, mais alors comment expliquer que ces derniers ainsi que les personnes racialisées en général soient les premières cibles du contrôle au faciès à l’entrée du centre-ville ?[4]

Le MJCF 67 et l’UEC Strasbourg dénoncent le caractère idéologique de la querelle autour de l’arche du Christkindelsmärik et tiennent à remettre au goût  du jour la question qui devrait être véritablement débattue lors du Marché de Noël, celle sur la pertinence des mesures sécuritaires absurdes, coûteuses et liberticides. Nous estimons que dans le litige entre les fascistes et la municipalité la seule perdante est la population, encore une fois victime d’une hypermédiatisation de la désinformation. Les protagonistes de cette querelle sont les deux pièces de la même monnaie : d’un côté l’Etat français est un des piliers de la déstabilisation impérialiste dans le monde et par ses actes guerriers se retrouve confronté à la menace djihadiste, il doit alors mettre en place des dispositifs de sécurité liberticides mais structurellement inefficaces (puisqu’il s’attaquent aux effets et non aux causes du terrorisme). De l’autre côté, dans cette dérive sécuritaire les groupes fascistes se trouvent de plus en plus à l’aise pour que leurs arguments envahissent le débat public, et contribuent ainsi à leur tour à renforcer l’autoritarisme de nos villes. Mais lorsque ce dernier a des retombées sur la tradition et l’identité régionale/nationale, la sacrée alliance paraît se briser, juste pour un instant, mais nécessaire pourtant pour donner l’impression d’un combat véritable entre fascisme de groupes et fascisme d’Etat.

 

Mouvement des Jeunes Communistes du Bas-Rhin et Union des Etudiants Communistes de Strasbourg

 

[1] Pour notre analyse du dispositif sécuritaire pour l’édition 2016 du Marché de Noël : http://uecstrasbourg.over-blog.com/2016/12/marche-de-noel-de-strasbourg-2016-bienvenue-a-la-forteresse-de-strasbourg.html

[4] A titre d’exemple, voir les articles de La Feuille de chou : http://la-feuille-de-chou.fr/archives/90939 et http://la-feuille-de-chou.fr/archives/91006

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