Quand l'Islande donne une leçon au FMI et à l'UE !

Publié le 9 Mai 2011

Quand l'Islande donne une leçon au FMI et à l'UE !

Article du quotidien britannique « Morning Star », écrit par Nick Dearden, dirigeant de « JubileeDebtCampaign », une organisation appelant à annuler les dettes impayables des pays les plus pauvres.

 

Veuillez consultez l’article original ici : http://www.morningstaronline.co.uk/index.php/news/content/view/full/103570


traduction WW (UEC STRASBOURG)

 

L'Islande donne l’exemple le peuple dit : Non ! 

La semaine dernière, on a vu deux réactions très différentes à la prétendue crise de la dette européenne. À une extrémité de l'Europe, les Islandais ont derechef décidé de ne pas accepter les conditions de paiement de leurs « créanciers », à savoir les gouvernements conservateurs britannique et néerlandais, suite à l'effondrement des banques privées islandaises en 2008. De l’autre côté, le Portugal se voit cruellement administrer une thérapie de choc par l'Union européenne, le peuple de ce pays n’ayant aucune voix au chapitre dans ce processus qui va changer profondément sa vie.

Ce ne sera pas la sinécure ni pour l'Islande ni pour le Portugal ces prochaines années ; or il ya un monde de différence entre le refus du peuple d'Islande de« payer pour les banques privées en faillite », selon les mots de leur président, et le supplice imposé aux Portugais de l'extérieur. Le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, l’a d’ailleurs dit très clairement : les négociations sur l'avenir du Portugal sont « certainement pas destinées au débat public ». 

La décision que le peuple islandais a prise n’est assurément pas irréfléchie. Il est bien conscient du fait que ce refus de payer est la démarche la moins facile à court terme : la Grande-Bretagne et les Pays-Bas porteront plainte, les marchés financiers seront irrités et son adhésion à l'UE sera menacée ; mais aux yeux des Islandais, l'orthodoxie libérale sur la façon dont les pays sont censés faire face à leur dette n'est pas seulement contre-productive au plan économique, elle est profondément injuste et redistribue les richesses au sein de la société de manière complètement inique. Comme le dit Thorgerdun Asgeirsdottir, 28 ans : « Je sais que cela nous fera sans doute du mal au niveau international, mais il vaut la peine de prendre une position ferme. »

Si le peuple d'un pays qui a carrément épousé l'idéologie de la concurrence libre et non-faussée, s’embarquant sur la galère des marchés financiers déréglementés et des prêts à taux d’intérêt bas mais très risqués, peut refuser de payer pour les crimes de ses banquiers : alors que ceux qui ont profité bien moins durant les décennies du boom financier s’inspirent de ce courage !

En Grèce, cette colère commence à se transformer en un défi constructif au pouvoir de la finance. Des centaines d'universitaires, politiciens et militants réclament une commission de réexamen de la dette qui analyserait publiquement les obligations— ce faisant mettant en place un modus operandi aux antipodes de la façon dont le Fonds monétaire international et l'Union européenne travaillent à huis clos et administrent leurs médicaments délétères aux pays membres. […] Au début du mois prochain, des militants de toute l'Europe et des pays en voie de développement se réuniront à Athènes pour mettre sur pied un programme qui va contester les politiques du FMI en Grèce.

Pour le Portugal, la cure d’austérité commence à peine à être échafaudée. Comme en Grèce et en Irlande, un prétendu « plan de sauvetage » profitera principalement aux banques privées d'Europe occidentale, l'encours des prêts au Portugal se montant à 216 milliards d’euros, tandis que les ouvriers et les jeunes subiront un programme douloureux de réduction des dépenses, d’abaissement des droits des travailleurs et de privatisations généralisées. Le chef de la banque portugaise Banco Carregosa a déclaré au « Financial Times »: « Il n'est pas exagéré d'appeler cela une thérapie de choc. »

Les analogies avec les pays en voie de développement sont évidentes, et les erreurs y commises sont en train d’être répétées. À maintes reprises, les banques privées ont été renflouées et les plus pauvres ont été poussés encore plus dans la misère. Aujourd'hui, des pays de la Sierra Leone ou la Jamaïque accumulent de plus en plus de dettes pour faire face, une fois de plus, à la tempête dans le monde des banquiers.

De toute évidence, augmenter encore plus les malheurs des Portugais ne servira à rien pour ranimer l'économie. Il est vrai que la dette du Portugal est tout à fait intenable ; mais c’est en grande partie le résultat d’activités privées périlleuses au cours de la dernière décennie. Ceux qui en sont responsables sont renfloués, ceux qui ne le sont pas souffrent. C'est ce que l'Islande a refusé de faire.

Les habitants de l'Islande se sont levés pour défendre leur souveraineté. Leur avenir est beaucoup plus heureux que celui de l'Irlande ou du Portugal. Le peuple grec est au début de son combat. Les résultats de ces batailles populaires auront un impact monumental sur la lutte contre la pauvreté et les inégalités à travers le monde.

  

La dette islandaise

Octobre 2008 : le gouvernement prend le contrôle des banques du pays après que le boom alimenté par le crédit et l’endettement a été victime de la crise bancaire mondiale.

Novembre 2008 : le Fonds monétaire international approuve un prêt de 1,6 milliard d’euros à l'Islande.

Mars 2010 : le peuple d'Islande vote« Non »lors d’un référendum sur la question du remboursement de 3,9 milliards d’euros à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas,obligations contractées après l'effondrement de la banque privée Icesave.

Décembre 2010 : le gouvernement islandais s'engage à rembourser aux gouvernements britannique et néerlandais 3,9 milliards d’euros, étalé sur 30 ans à compter de 2016.

Février 2011 : le parlement islandais approuve cet engagement.

Avril 2011 : le peuple d’Islande rejette l'entente une deuxième fois dans un nouveau référendum. La Grande-Bretagne annonce qu'elle portera plainte contre l'Islande pour récupérer l'argent de force.

Publié dans #International, #Islande, #UE

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