Non à la sélection en Master : éducation pour tous et pour toutes !

Publié le 31 Décembre 2016

Non à la sélection en Master : éducation pour tous et pour toutes !

I) La réforme des masters dans la logique de privatisation des universités

Nos universités connaissent depuis trente ans des coups de canifs de la part des gouvernements successifs. Tous répondants à des logiques marchandes et commerciales. Nos aînés se sont déjà battus contre la loi Devaquet, qui présentait toutes les caractéristiques de la casse des universités ; et nous nous sommes également battus contre les lois LRU et Fioraso, qui garantissent pour les instances dirigeantes des facultés et le patronat, le principe de libéralisation et de privatisation de nos lieux d’enseignement.

Or, aujourd’hui certains acteurs du monde universitaire souhaitent donner un blanc-seing à une réforme mère d’inégalité, la sélection en Master ! Sous le poids des présidents de facultés, plus intéressés par leurs carrières, et le patronat obnubilé par les nombreux profits que leur procurerait la privatisation de l’enseignement dans notre pays, les forces « du progrès » ont complètement abandonné les étudiant.e.s en signant pour cette réforme du master. “La sélection”, le mot est lâché et il fait mal. Une situation qui restait jusqu’ici illégale dans notre pays, notamment après l’invalidation du Conseil d’État, le 10 février 2016, d’un décret gouvernemental prévoyant une liste de 1300 mentions sélectionnables.

Toutefois, la digue cède et cet écran de fumée est là pour officialiser une pratique connue dans le milieu universitaire et souvent invoquée par les enseignants. Ces derniers qui poussèrent pour voir apparaître une sélection légale et officielle dans nos universités. Pour l’expliquer, ils évoquent l’augmentation des moyens, donnés à un plus petit nombre, ou encore la présence d’une « aristocratie » étudiante. Mais ces justifications sont aussi fallacieuses que naïves. Il existe une construction à court terme d’une université à deux vitesses, et à long terme la mort de l’université publique d’État​. Et cette situation a des conséquences sur les étudiant.e.s.

II) Quelles sont les conséquences de cette réforme ?

Cette réforme des masters peut se résumer de manière simple : les universités pourront désormais sélectionner librement à l’entrée du M1​. En “contrepartie”, elles seront obligées de proposer aux étudiant.e.s non retenu.e.s au moins trois options de master différents vers lesquels s’orienter.

Toutefois, la réforme ne précise pas les critères sur lesquels les étudiant.e.s seront, dans les faits, accepté.e.s ou non en master. “Critères basés sur la motivation et le projet professionnel de l’étudiant.e”… : cela reste extrêmement flou​ !

Du côté des professeur.e.s, il ne faut pas s’y méprendre non plus : quand certains évoquaient les problèmes liées à la sélection en master, il s’agissait en fait des problèmes que eux rencontraient ! En effet, plusieurs recours ont été intentés par des étudiant.e.s qui s’étaient vu.e.s refuser l’accès en M1 ou en M2. Suite à quoi les tribunaux ont à chaque fois donné raison aux étudiant.e.s, jugeant donc que les pratiques sélectives des universités étaient illégales. En réalité, les universités, en réclamant cette réforme, cherchaient simplement à se mettre à l’abri d’éventuels recours juridictionnels. Il y avait un vide dans la loi, et désormais l’administration des facultés dispose d’un cadre juridique pour pouvoir sélectionner en toute sécurité. On ne résout pas un problème en le légalisant !

Renforcement de la sélection sociale

Pour compenser cette légalisation de la sélection, la réforme fait semblant de maintenir un soit disant “droit à la poursuite des études”, avec l’obligation de toujours proposer trois options de master à l’issue de la licence. Toutefois, ces propositions, par définition, ne correspondront pas aux masters choisis initialement par l’étudiant.e. De plus, cela pourra impliquer un changement d’université. Ce garde fou est donc hypocrite : il s’agira de changement d’académie contraint ​afin de faire un master pour lequel on n’a jamais postulé ! La promesse de créer des bourses d’aide à la mobilité n’est qu’un pansement pour cacher le véritable problème.

Une fois de plus, les étudiant.e.s les plus pénalisé.e.s par ces mesures seront ceux qui appartiennent aux classes les plus défavorisées. Comment envisager de changer de ville, avec toutes les dépenses que cela implique, quand on parvient déjà à peine à payer son loyer et ses dépenses en jonglant entre fac et job étudiant ? Cela sera une contrainte supplémentaire qui risque de forcer les étudiant.e.s à rester dans leur académie pour y faire des études ne correspondant pas à leur choix.

De même, pour un.e étudiant.e qui n'a d'autre choix que d’habiter chez ses parents, celui-ci sera tout simplement obligé de faire face à ces nouvelles dépense en cas de changement d'université. Ce qui signifiera nécessairement la recherche (il n'y aucune garantie d'en trouver un, bien au contraire) d'un job étudiant, première cause d'échec dans les études.

On risque donc de voir apparaître des masters à deux vitesses​, avec d’un côté les quelques masters les plus demandés, faisant l’objet d’une sélection de plus en plus rude ; et de l’autre, des “masters poubelles” où les étudiant.e.s se retrouveront par défaut, pour ne pas dire par hasard.

Il faut noter que cette logique de sélection particulièrement dure existe déjà, et notamment à Strasbourg en ce qui concerne le passage entre le M1 et le M2. On pense à la faculté de droit, où quelques M2 sont particulièrement prisés au détriment des autres. Avec cette réforme, ce fossé risque de s’élargir encore plus, et cette tendance sélective et élitiste va se généraliser à l’ensemble des filières​.

Toujours plus de sélection mais toujours moins de moyens !

D’un point de vue logique, avec un manque de moyens d’un côté et des pratiques sélectives accrues de l’autre, comment financer les programmes d’études ? Ce seront aux étudiant.e.s de payer plus​ de leur poche, ce qui impliquera éventuellement une augmentation des frais d’inscription. Ainsi, on risque d’assister à un renforcement de la privatisation des financements à l’Université.

Avec l’idée de sélection, on renforce également la logique de concurrence​, que ce soit entre les universités ou au niveau des étudiant.e.s entre eux. De manière générale, l’intention est de concurrencer à terme les grandes écoles en créant une élite au sein même des facultés.

Les universités sont des endroits de transmission du savoir et de développement de la pensée critique​ qui ont pour objectif l’émancipation de l’individu. Ce ne sont pas des lieux favorisant l’élitisme dans le but de concurrencer les grandes écoles en se calquant peu à peu sur leur modèle !

III) Nos propositions

Pour faire face à la destruction de l’Université française, l’Union des Étudiants Communistes exprime son opposition à la réforme des masters et propose plusieurs réformes qui pourraient être mises en place dès maintenant  :

- L’interdiction de toute sélection à l’Université

Nous passons déjà des examens à chaque semestre, nous permettant en cas de réussite d’accéder à l’année supérieure. Ces examens sont déjà garants d’un certain niveau scolaire. De plus, il existe déjà une sélection sociale des étudiant.e.s. Pourquoi y rajouter une sélection élitiste à l’Université ?

- Un réinvestissement de 3 milliards d’euros dans l’éducation supérieure

Si des filières se retrouvent surchargées, c’est avant tout par manque de moyens​. Redonnons à l’Université la capacité d’accueillir tous les étudiant.e.s sans distinction: plus de professeurs, plus de salles, plus de matériel. Cet argent peut par exemple être pris sur diverses subventions dont l’apport est très faible par rapport aux sommes investies, telles le CICE ou le Crédit Impôt Recherche.

- Un cadrage national des diplômes

Peu importe notre lieu d’apprentissage, nous travaillons tous autant pour obtenir nos diplômes. Mettons fin à la concurrence injuste​ entre les étudiants, en proposant des formations ayant les mêmes exigences pédagogiques et les mêmes moyens alloués sur tout le territoire français.

 

Union des Etudiants Communistes de Strasbourg

Publié dans #Université

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article