En Italie, les jeunes communistes mettent la précarité au cœur du débat
Publié le 26 Avril 2011
Tribune de Flavio Arzarello, coordinateur national de la Fgci (Fédération des Jeunes Communistes italiens). Notre blog poursuit son tour d'Europe des luttes de la jeunesse. En Italie, nos partenaires de la FGCI luttent de toute leur force pour combattre la précarité fléau de la vie des millions de jeunes italiens afin de faire bouger les lignes...
Pour consulter l’article original sur le site du Pdci (Parti des Communistes italiens) : http://www.comunisti-italiani.it/modules.php?op=modload&name=News&file=article&sid=7467&mode=thread&order=0&thold=0
"Les Jeunes ont compris"
La grande manifestation contre la précarité du 9 avril a marqué un tournant dans notre pays : la précarité et les précaires, désormais la majorité entre les jeunes en Italie, ont envahi les rues pour dénoncer leur condition insoutenable, qui depuis plusieurs années ne concerne plus seulement le monde du travail, mais qui est devenue le paradigme de notre vie, gagnant aussi d’autres générations que la nôtre.
Aujourd’hui ne sont pas seulement précaires les jeunes avec des contrats à durée déterminée : le sont aussi les chercheurs, souvent obligés de quitter notre pays pour faire leur chemin, le sont les travailleuses et travailleurs de Fiat à Mirafiori et à Pomigliano auxquels Marchionne, le grand patron de Fiat, a supprimé,avec le soutien du gouvernement et du syndicat patronal, la protection par la convention collective nationale, et le seront les étudiantes et étudiants, en particulier après la réforme Gelmini, qui a fait de l'École et de l'Université des endroits inaccessibles et souvent pas en mesure de jouer le rôle que notre Constitution prévoit.
Le 9 avril, après plusieurs mois de débats publics exclusivement axés sur les frasques (tout à fait déplorables) de Berlusconi, les yeux du public sont de nouveau orientés vers le social, comme cela était déjà le cas à la fin de l'année dernière, lors des mobilisations les travailleurs de Mirafiori et du mouvement étudiant massif.
Or cette mobilisation n'est pas un événement sporadique, elle s’inscrit dans l'idée de l'avenir que nous imaginons et que nous aimerions construire pour notre pays : nous devons dire clairement que la voie du libre marché, empruntée ces deux dernières décennies pendant lesquelles ses chantres ont fait l'éloge des privatisations et du démantèlement de l’ État-Providence, et qui a également eu de nombreux admirateurs à gauche, que cette voie-là a complètement échoué. C’est une période qui dans notre pays a coïncidé avec les vingt années de berlusconisme, qui sous-tend la barbarisation autoritaire de notre démocratie et notre régression sociale.
Il semble utile de reconstituer les étapes de ce processus : en 1993 on s’attaque à l’indexation des salaires au taux d’inflation, sous le prétexte de l’inflation faible de l’époque, en 1995 le système des retraites est transformé dans un système par capitalisation, toujours en 95 on abroge l’interdiction du travail temporaire, au cours des années 2000 on continue à saper et affaiblir la protection par la législation du travail, transformant la précarité en normalité, et finalement, ces jours-ci, ils essaient, sous le prétexte de la crise capitaliste, de démolir la convention collective nationale ; parallèlement, l'Éducation publique a subi des coups mortels, dont le dernier est la réforme Gelmini.
Si l’on considère donc le battage médiatique dont a profité la frénésie libérale, nous nous trouvons en face d'une prise de conscience hors pair, qui doit être traduite en propositions politiques, formant l'élément essentiel de la gauche.
La première tâche qui nous attend est de faire de la précarité et du drame quotidien de notre génération un thème de la grève générale annoncée pour le 6 mai par le syndicat Cgil ; la seconde, à plus long terme, est de faire du collectif « Notre temps est maintenant » un lieu de rencontre permanent où nous mettons nos énergies ensemble, et aussi la force motrice derrière les propositions pour un changement politique : abrogation de la loi 30, symbole de la contre-réforme en matière de législation du travail, un nouvel intérêt pour une meilleure redistribution des richesses et la construction d'un nouvel État-Providence. Cela doit être un débat à 360 degrés, avec les partis politiques, associations, syndicats, marqué par une idée plus large et ouverte de notre pays : à Marchionne, au syndicat patronal Confindustria et à Berlusconi, qui perpètrent des coupes claires dans l’Éducation publique, rabaissent le niveau des salaires à l’envie et forcent les travailleurs à renoncer au droit de grève en échange de leur poste de travail...
Nous devons opposer la société du savoir et des droits, non seulement comme un choix politique, mais aussi comme la seule voie possible pour un pays comme l'Italie, au cœur de la vieille Europe, pour résister à la concurrence mondiale. Seulement la combinaison savoir-droits peut nous mener vers l'Italie de l’avenir, où il n’y aura pas de Berlusconi, et où il ne devrait pas y avoir de la précarité.