COMMUNIQUÉ- Gilets jaunes/gilets rouges ?

Publié le 2 Décembre 2018

COMMUNIQUÉ- Gilets jaunes/gilets rouges ?

Depuis plusieurs semaines les débats font rage au sein du mouvement ouvrier sur la question des « gilets jaunes ». Entre d'une part les camarades sceptiques quant à la pertinence de s'investir dans cette protestation dû au fait de la présence d’éléments fascistes dans le mouvement et l'aspect interclasse de la revendication de la baisse des taxes, et d'autre part les opportunistes organisant une unité de façade et ne voyant dans les gilets jaunes qu'une potentielle base électorale. Tout d'abord très critiques envers les gilets jaunes, les directions locales et nationales des centrales syndicales ont finalement décidé d'avancer la revendication de la hausse des salaires comme mot d'ordre fédérateur. Mais sans perspective organisationnelle dans la lutte, la modalité de convergence devient opportuniste. Le mot d'ordre est alléchant pour la classe ouvrière, mais en n'établissant pas les moyens d'action assurant la satisfaction de cette revendication, on choisit implicitement de l'atteindre à travers la négociation, le compromis de classe et l'électoralisme bourgeois. Cela revient à enfermer le potentiel révolutionnaire de la classe ouvrière dans les mailles du système économique et politique capitaliste. L'Histoire montre que toute revendication courtermiste peut prendre de l’importance uniquement si elle s'accompagne d'une perspective plus large de lutte contre l’exploitation patronale, de lutte contre l'extraction de la plus-value, contre la propriété privée des moyens de production, en somme contre les structures mêmes du système capitaliste. Cette lutte a donc besoin de moyens d’action conséquents : ni les pratiques de négociation et compromis, ni les émeutes sporadiques et éminemment esthétiques, ne sauront donner satisfaction au prolétariat au long terme. Au contraire, la seule perspective révolutionnaire sérieuse se concrétise dans la grève générale économique et politique, dans les occupations des lieux de travail et dans les blocages économiques, ayant pour objectif de provoquer la crise finale du système et de préparer la classe prolétaire à le remplacer par le pouvoir ouvrier.

 

Les événements ayant eu lieu lors de la manifestation « Gilets jaunes/Gilets rouges : une colère légitime » du 1er décembre à Strasbourg traduisent parfaitement ce manque de perspectives révolutionnaires des directions syndicales locales. L'attentisme et le légalisme syndical s'est trouvé vite dépassé par les aspirations de révolte des gilets jaunes. En pleine tenue du Marché de Noël à Strasbourg, le cortège des gilets jaunes n'a pas souhaité rester cantonné en-dehors de l'hyper centre - lieu de forte influence - et a donc entamé une percée du périmètre de sécurité gardé par des CRS. Face à cela, les responsables du cortège syndical ont décidé de se désolidariser des gilets jaunes et continuer le parcours déposé à la préfecture. Ils ont provoqué ainsi des incompréhensions et des tensions entre les dits responsables et une base militante désireuse de créer une unité d'action réelle avec les gilets jaunes. En agissant ainsi, les responsables syndicaux ont empêché la solidarité concrète entre gilets jaunes et militants ouvriers. En soutenant les gilets jaunes dans leur action, le cortège syndical aurait évité leur répression physique et par la même occasion aurait évité le morcellement de la manifestation unitaire en une infinité d’initiatives improvisées et inefficaces. Le légalisme bourgeois qui traverse une partie du syndicalisme, et qui conditionne les directions syndicales dans un attentisme qu’elles considèrent comme consensuel, enferme ces dernières dans une situation contradictoire : elles souhaitent créer l'unité des travailleurs mais en imposant leurs pratiques rituelles et réformistes dont les masses ne veulent plus. L'unité se fait par et dans la lutte et non dans les mots d'ordre. Ce dont a besoin le mouvement des gilets jaunes c'est d'une organisation syndicale de classe et d'un parti de classe, pour qu’au sein du mouvement s’opère une clarification des lignes entre éléments prolétariens et éléments petit-bourgeois (ce qui semble déjà en cours après la publication de la liste des revendications du 29 novembre), et ainsi ensuite emmener la révolte spontanée vers un mouvement construit autour de la grève générale, des occupations et des blocages économiques, seules armes efficaces face à l’exploitation, seuls instruments pour renverser le système capitaliste et pour le remplacer avec le pouvoir ouvrier, le socialisme. Malheureusement, en perpétuant une politique de compromis, les directions syndicales privent les travailleurs de toute perspective victorieuse, et cela malgré l'appel des masses à entamer une lutte violente contre la misère ouvrière.

 

Enfin, la présence d'éléments réactionnaires au sein du mouvement des gilets jaunes s’inscrit dans une montée latente du fascisme en France s'appuyant sur la crise du capitalisme à son stade impérialiste pour se nourrir de la misère grandissante de notre classe et ainsi diviser les travailleurs selon leur origine, leur religion, leur orientation, en assurant toujours la pérennité de l'exploitation capitaliste. Si nous devons lutter contre la présence des agents de la réaction au sein du mouvement des gilets jaunes en poussant à des mots d'ordre révolutionnaires, nous ne pouvons blâmer le mouvement en soi d'accueillir les chiens de garde du patronat puisque celui-ci ne constitue pas une organisation homogène et structurée, et du fait d'un fonctionnement marqué par l’absence de moments de prise de décision collective, il peut être intégré et noyauté par tous et n’importe qui. Il est évident qu'en l'absence en France d'un parti de classe, et considérant les contradictions internes au syndicat de classe et de masse, les fascistes instrumentalisent plus facilement la colère ouvrière pour diffuser leur propagande raciste, et essayent de le faire même au sein d'organisations historiquement révolutionnaires, qui, désarmées par les sociaux-démocrates, laissent s'installer toute sorte de division au sein de la classe ouvrière.

 

Reconstruire un parti révolutionnaire œuvrant pour la construction du socialisme, redonner une orientation de classe et une pratique conflictuelle au syndicalisme, sont plus qu'à l'ordre du jour et constituent la seule alternative aux révoltes spontanées et sans perspectives ainsi qu'au fascisme.

 

Pour la révolution et le socialisme, organise ta colère !

 

Mouvement des Jeunes Communistes du Bas-Rhin

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