Déclaration des Jeunes Communistes du Bas-Rhin sur la couverture d'agressions sexuelles à Strasbourg par la direction du PCF 67 et par la direction nationale du MJCF

Publié le 21 Mars 2019

Déclaration des Jeunes Communistes du Bas-Rhin sur la couverture d'agressions sexuelles à Strasbourg par la direction du PCF 67 et par la direction nationale du MJCF

Depuis plusieurs jours, témoignages et dénonciations de violences sexuelles au sein du Mouvement des Jeunes Communistes de France et du Parti Communiste Français sont dévoilés par des militantes de ces organisations qui, face à la passivité et la protection des agresseurs de la part des directions nationales et locales, se sont tournées vers les médias. Nous tenons tout d’abord à exprimer notre soutien inconditionnel aux victimes. Cela fait plusieurs années que notre fédération alerte la direction nationale du MJCF, la direction départementale du PCF et l’ensemble des militants sur les violences sexuelles perpétrées au sein de ces organisations, violences qui n’ont donné lieu à aucune exclusion des agresseurs, couverts au contraire par des membres des diverses directions.

 

Nous avons pu constater par nous-mêmes les procédés par lesquels le PCF et le MJCF traitent ces violences lorsqu’ils y sont confrontés. En novembre 2016, une militante de la Jeunesse Communiste du Bas-Rhin nous a témoigné avoir subi une agression sexuelle de la part d’un membre de notre fédération, délégué au Conseil national du MJCF et également membre du Conseil départemental du PCF 67. Immédiatement, nous avons pris la décision d’exclure l’agresseur de notre organisation ainsi que d’informer la direction départementale du PCF 67 et la direction nationale du MJCF afin que les mêmes dispositions soient exécutées. Non seulement l’individu n’a pas été suspendu ni démis d’aucune responsabilité nationale ou locale, mais la direction du PCF 67 a tout fait pour enterrer l’affaire. Dès qu’elle en a été au courant, elle a immédiatement pris contact avec l’agresseur. Ainsi, un groupe de cadres locaux - dont l’agresseur - a réalisé une véritable descente auprès d’une des militantes de notre fédération en l’intimidant afin de connaître la source des accusations. Ensuite, en prévision d’une rencontre bilatérale PCF-MJCF à ce sujet, la direction du PCF 67 a tout fait pour que l’entrevue reste informelle (la dispensant de tout compte-rendu), en esquivant la convocation des instances élues du MJCF 67 et pratiquant une invitation sélective. De cette rencontre, nous retenons surtout qu’on nous a invités à nous délaisser de l’affaire et de le confier à des associations de professionnels (comme si l’un s’opposait à l’autre), et qu’il n’a jamais été question de sanctions à l’égard de l’agresseur. La direction du PCF 67 a ensuite sciemment refusé d’informer l’ensemble de ses adhérents sur les faits dont elle avait eu connaissance (laissant ainsi l’individu en question fréquenter sans problème le reste des adhérents). Enfin, et en dernier lieu, la direction du PCF 67 s’est daignée de rencontrer la victime et lui a tout bonnement conseillé de s’éloigner du MJCF 67, prétendant que nous étions en train de la manipuler. Tous les mots de soutien à la victime qui ont pu être prononcés se sont vite révélés comme étant de la langue de bois, dès lors que le PCF 67 n’a pris aucune sanction envers l’agresseur ni aucune démarche de transparence à l’égard de l’ensemble des adhérents.

 

Ainsi, l’agresseur n’a jamais été inquiété par aucune instance interne des organisations en question : il figurait parmi les responsables nationaux du MJCF jusqu’à la fin de son mandat lors du renouvellement du Conseil national (Assemblée Nationale des Animateurs, Paris, 8-10 décembre 2017), et il figurait parmi les responsables locaux du PCF 67 jusqu’au dernier renouvellement de Conseil départemental (congrès de Schiltigheim, 9-11 novembre 2018). Ce n’était pas juste que le nom de l’agresseur figurait dans les listes de membres des dites directions, desquelles on aurait « oublié » de l’enlever, mais il a bien pris part aux activités militantes du PCF 67 (distributions de tracts, Fête de l’Humanité 67) pendant plusieurs mois après que les faits le concernant avaient été portée à la connaissance de la direction locale du Parti. Quant au Conseil national du MJCF : le mandat de l’agresseur n’a jamais été déchu, non seulement vis-à-vis des accusations le concernant, mais également vis-à-vis de son exclusion formelle du MJCF 67 ; il ne se rendait plus au CN déjà bien avant les faits, il a tout simplement continué à ne pas s’y rendre. Son nom sera cité par la direction nationale du MJCF dans la liste des membres démissionnaires et fait applaudir lors du renouvellement du CN qu’a eu lieu à l’ANA 2017.

 

Suite à de multiples alertes lancées par le MJCF 67 et suite à la parution d’un article relatant de nombreux cas d’agressions sexuelles au sein de MJCF et PCF dans le journal Le Monde du 6 janvier 2018 - et citant expressément un cas à Strasbourg -, la direction du PCF 67 a été saisie par l’une de ses sections, demandant des explications. La question a été posée au Conseil départemental du PCF 67 du 11 janvier 2018, mais la direction a esquivée toute réponse. La question a été réitérée alors par une lettre officielle de la section à la direction, le 5 février 2018. La direction du PCF 67 y répondra seulement le 11 mai 2018. Nous citons la réponse apportée dans ce document officiel : « Il s'avère que les faits relatés par les camarades du MJCF ont eu lieu dans un cadre privé et non dans un cadre politique, et qu'ils n’ont donné lieu, à notre connaissance, à aucune suite et à aucune plainte entre les différents protagonistes ».

Ainsi la direction du PCF 67 s’ancre toujours plus dans la complicité et la négation des faits quitte à en devenir grotesque, jusqu’à la remarque odieuse que l’agression sexuelle a eu lieu dans un cadre privé et non dans un cadre politique. Voilà la méthode du PCF : pour que cette organisation prenne des mesures à l’encontre des agresseurs dans ses rangs, il faut d’une part que l’agression ait lieu pendant une manifestation ou dans les locaux du PCF, et d’autre part que l’agression soit suivie d’une plainte. Autrement, la parole des victimes ne vaut rien. Le même document de mai 2018 ne mentionne nulle part la responsabilité de dirigeant du PCF 67 de l’agresseur, essayant ainsi de faire passer l’affaire comme étant tout interne au MJCF 67. Notons enfin que dans son document la direction du PCF 67 s’est excusée du retard de sa réponse (3 mois) étant donné que toutes ses énergies étaient prises par les élections municipales à Schiltigheim. Nous voyons bien par-là quelles sont ses priorités : il faut d’abord s’occuper des élections et seulement ensuite on peut daigner de donner une réponse aux questions d’agressions sexuelles.

Par la même occasion, la Commission Féminisme de la direction nationale du PCF a été saisie par la section en question de la fédération bas-rhinoise du PCF, mais cette Commission ne s’est daignée de fournir aucune réponse à ceux qui l’avaient sollicitée.

Enfin, il y a quelques jour, apprenant qu’un média s’apprêtait à publier un article sur ces faits, la direction du PCF 67 a contacté promptement la direction nationale du MJCF afin d’établir une version commune et se protéger mutuellement. Il est donc évident que toutes les belles promesses des directions MJCF et PCF des dernières semaines sur la prise en compte immédiate de la parole des victimes pour aboutir à des exclusions ne sont que des mensonges.

 

Ainsi, en presque trois ans, aucune mesure n’a été prise et la direction du PCF 67 joue la sourde-oreille à l’image du MJCF. Mais l’affaire dont il est question ici n’est que la pointe de l’iceberg. Après ce « premier cas », les témoignages se multiplient vis-à-vis d’autres comportements de membres du PCF 67 (ou d’anciens membres du MJCF 67 aujourd’hui ayant accédé à de postes « prestigieux » au sein du PCF 67) qui sont restés depuis bien d’années sans réaction de la part des instances locales : des remarques sexistes à des cas de harcèlement sexuel de jeunes militantes.

 

Pour justifier leur passivité, les directions nationales du MJCF et du PCF usent d’un argument-type des organisations bourgeoises, selon lequel aucune sanction ne doit être prise tant que la justice n’a pas été saisie et n’a condamné les agresseurs. Ces propos nient la difficulté pour une victime de violences sexuelles de dénoncer son agresseur face au traumatisme qu’elle vit, aux structures patriarcales culpabilisantes auxquelles la victime doit décrire en détail les faits sans pour autant recevoir justice - car la majorité des cas de violences sexuelles ne débouchent sur aucun procès et encore moins sur une condamnation -. Ces organisations réformistes attendent de la justice bourgeoise qu’elle fasse le ménage à leur place et dans leurs rangs, se couvrant derrière le fait que nul ne peut échapper au patriarcat, même pas une organisation se prétendant révolutionnaire.

Les réponses qui ont été fournies par les directions nationales du PCF et du MJCF ces dernières semaines – en interne et publiquement –, montrent bien l’épilepsie fébrile et myope de ces organisations : décharge de responsabilité des uns aux autres ; demandes aux victimes de fournir des preuves tangibles de leurs accusations ; menaces de porter plainte pour diffamation contre les victimes d’abord, puis affirmation de soutien inconditionnel à leur égard ; incapacité de définir qui a couvert quoi et qui aurait dû faire quoi ; mise en place d’instances sur instances exclusivement au niveau national (tandis que c’est au niveau local que la plupart de violences ont lieu et que s’opère l’isolement des victimes, la couverture des agresseurs et la création autour d’eux d’un cercle compact de soutiens prêts à témoigner en leur faveur, à menacer les victimes, à garder le silence face aux questionnements légitimes d’autres adhérents). Pour les directions nationales de PCF et MJCF, l’urgence est à garder intacte la machine, ce qui explique l’inconsistance politique des résolutions prises récemment : les adhérents accusés de violences sont désormais censés être suspendus/exclus, parce que la tempête médiatique n’a pas laissé le choix aux directions. Mais quid de tous ceux qui ont couvert les viols et les agressions pendant des nombreuses années ? quid de tous ceux qui ont participé à la culpabilisation et l’isolement des victimes ? Vu qu’il n’existe pas de plainte possible pour ces faits, et que c’est précisément le recours à la justice bourgeoise qu’attendent PCF et MJCF pour sanctionner un agresseur, aucune sanction politique ne sera appliquée aux complices. Ainsi, après avoir exclu les agresseurs dont le nom était le plus connu, la machine pourra recommencer à tourner comme avant, faire bonne figure et continuer ses activités électoralistes, sans avoir été changée en profondeur.

 

Le comportement du MJCF et du PCF face à la résurgence médiatique de tant d’affaires qu’ils avaient souhaité oblitérer sont une preuve de plus que ces organisations ont abandonné le rôle d’avant-garde au sein des masses. En tant que communistes, nous devons à tout moment nous comporter selon les principes qui nous guident, ceux du marxisme-léninisme. Lorsque des éléments de l’organisation adoptent un comportement réactionnaire et dangereux, lorsqu’ils reproduisent les logiques d’exploitation et domination patriarcales, il est du devoir de l’organisation entière d’y remédier afin d’assurer la juste application d’une politique d’avant-garde, seule capable d’amener à l’émancipation totale des travailleurs et des travailleuses, celle du socialisme et de la destruction du patriarcat. Nous n’avons pas à attendre une décision de la justice bourgeoise et patriarcale pour apporter soutien et secours aux victimes d’agression, pour suspendre/exclure les membres suspectés d’agression. Si nous ne sommes pas capables d’apporter une réponse claire au patriarcat au moins dans nos rangs, nous ne valons pas mieux que le système que nous prétendons combattre. Tout cela nous convainc que c’est l’abandon de la ligne d’avant-garde par le PCF et le MJCF, et leur dégénérescence idéologique, qui les mène à accepter et à défendre des agresseurs sexuels : c’est l’une des raisons pour lesquelles nous sommes aujourd’hui en totale rupture avec les directions de ces organisations et avec les éléments qui les suivent aveuglement, s’illustrant toujours plus dans la trahison des principes marxistes-léninistes. À l’heure où certains bureaucrates et opportunistes tentent d’instrumentaliser la question des violences sexuelles au sein du MJCF afin d’arriver aux postes clés de l’organisation, nous affirmons que c’est l’idéologie même du MJCF, celle de la social-démocratie, qui est le terreau des violences sexistes et sexuelles en son sein. Nous affirmons également que seulement un retour au marxisme-léninisme permettra de fonder une organisation intransigeante vis-à-vis de tout comportement réactionnaire et patriarcal, une organisation à la hauteur de la révolution qu’elle prêche, c’est-à-dire le renversement du capitalisme et de toutes les formes d’exploitations qu’aujourd’hui sont inextricablement liées à celui-ci (patriarcat, racisme, LGBT-phobies…).

 

Plus que jamais, l’heure est à la reconstruction d’une organisation révolutionnaire pour la jeunesse prolétaire et d’un parti d’avant-garde pour les travailleurs ! Soutien à toutes les victimes ! Pour la révolution et le socialisme, pour le renversement du patriarcat, pour la reconstruction d’un féminisme de classe, organise ta colère !

 

Mouvement des Jeunes Communistes du Bas-Rhin (MJCF 67)

 

 

Pour aller plus loin : 

- Voir l'Article de Rue89 Strasbourg du 21 mars 2019

- Voir le Communiqué des Jeunes Communistes des Bouches-du-Rhône du 16 mars 2019

Déclaration des Jeunes Communistes du Bas-Rhin sur la couverture d'agressions sexuelles à Strasbourg par la direction du PCF 67 et par la direction nationale du MJCF
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Publié dans #Féminisme

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