De l’égalité salariale à l’émancipation : la lutte des femmes est une lutte des classes

Publié le 5 Novembre 2019

De l’égalité salariale à l’émancipation : la lutte des femmes est une lutte des classes

Dès 16h47 aujourd’hui, 5 novembre 2019, les femmes travailleront gratuitement en France. En raison de l'écart salarial entre les femmes et les hommes – en moyenne de 15,6 % -, chaque année une date est fixée symbolisant le moment à partir duquel les femmes ne seront plus payées jusqu'à la fin de l'année. Face à l’engouement qui se crée de plus en plus autour de cette date symbolique, il est de notre devoir de rappeler la dimension de classe de la question de l’écart salarial, pour ne pas céder à la rhétorique humaniste petite-bourgeoise qui s’en scandalise ou qui en fait son seul combat.

Si nous revendiquons énergiquement l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, nous ne tombons pas dans le piège idéaliste petit-bourgeois de penser que cette victoire constituerait la panacée ultime, éliminant tous les obstacles à l'émancipation des travailleuses. De fait, l'égalité salariale et la lutte pour l'obtenir ne remettent en cause ni la propriété privée des moyens de production ni le système d'exploitation qui s’abat sur les femmes et les hommes du prolétariat. Même à salaire égal, le travail produit n'est toujours pas égal au salaire, et la classe capitaliste continuera d’extraire la plus-value produite par l’ouvrier. En outre, l'égalité salariale ne suffit pas à elle seule à remettre en cause la totalité du système patriarcal. Celui-ci resterait intact dans ses manifestations les plus brutales, tant en dehors qu’en dedans des lieux de travail, par les violences sexuelles – dont le harcèlement patronal et les mécanismes de mobbing'1) en cas d’opposition –, une division du travail fondée sur une orientation genrée dès le plus jeune âge, les discriminations voire les licenciements se rapportant aux situations de grossesse et de congé maternité, les discriminations à l’embauche basées sur les « projets de fonder une famille ou pas », les moindres possibilités d’accéder à des postes de responsabilité, l’obligation de se rendre au travail en souffrant de maladies féminines telles que l’endométriose, etc. L’égalité salariale ne suffirait pas non plus à mettre un terme à la « double journée de travail » que subit la grande majorité de femmes ouvrières, puisqu’elle ne réglerait en rien la tendance – encore bien intacte dans les foyers familiaux hétérosexuels – à faire reposer sur les femmes les tâches domestiques ainsi que la reproduction de la force du travail du reste de la famille.

Ces quelques arguments suffisent à établir la raison pour laquelle il est impossible de considérer l'égalité salariale comme étant le but final, capable à elle seule de renverser capitalisme et patriarcat. Cependant, son obtention est une étape indispensable de la lutte de classe. Cette victoire nous permettrait, nous femmes du prolétariat, de nous armer dans la lutte que nous menons contre l'exploitation de classe et pour être reconnues comme des êtres humains à part entière. Toutes les victoires des femmes travailleuses nous permettent de nous ériger au même stade que les hommes du prolétariat afin de combattre côte à côte et sur des bases d’égalité pour renverser le système capitaliste et instaurer le socialisme, condition indispensable pour pouvoir mettre à bas le patriarcat de manière efficace et définitive. L’égalité salariale nous permettrait non pas une émancipation complète, mais une aide précieuse à affronter la précarité quotidienne qui nous oblige à travailler davantage, à nous faire exploiter davantage au travail et dans la famille, parfois même à cumuler deux ou trois jobs. Nous avons besoin de tous les moyens possibles pour survivre aux conditions de vie dramatiques que le système capitaliste nous impose. D'autre part, l’égalité salariale renforcerait grandement la cohésion interne à la classe ouvrière elle-même, tout simplement lui enlevant l’une des raisons qui permettent encore au capital de parcelliser notre classe – en fonction du genre, de l’origine, de l’orientation sexuelle, de la religion – pour mieux l’assujettir.

Il est temps pour les femmes du prolétariat de s'organiser et de lutter par des grèves intensives pour obtenir l’égalité salariale partout et sans conditions. Toutes les luttes et victoires des travailleuses sont des luttes et victoires pour la classe ouvrière, renforçant la conscience de classe et préparant le terrain à l’avènement de la seule société d’égalité possible : le socialisme-communisme. C’est seulement en enlevant les bases matérielles de l’inégalité de genre, la surexploitation du travail féminin, que l’on pourra s’atteler définitivement à détruire les formes d’oppressions qu’en découlent tant dans la sphère publique privée, et ainsi détruire les dernières vestiges du patriarcat.

(1)Harcèlement moral / psychologique à long terme exercé sur les travailleurs afin de les pousser à la démission. 

Jeunesse Communiste du Bas-Rhin

Publié dans #Féminisme

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