Projet Hercule : l'Etat bourgeois veut liquider EDF !

Publié le 19 Janvier 2021

Projet Hercule : l'Etat bourgeois veut liquider EDF !

« Il faut gagner la bataille de la nationalisation de l'Electricité et du Gaz », tels furent les propos tenus en 1945 par le ministre communiste Marcel Paul, créateur d'EDF.

Issue du programme du Conseil National de la Résistance, la création d’un monopole public de l'électricité fut une conquête ouvrière résultant du rapport de force instauré à la Libération par la puissance de la Résistance communiste face au collaborationnisme vichyste et par la victoire de l'URSS sur le nazi-fascisme. Mais elle reçut aussi à l'époque l’appui d'une partie du patronat à travers les partis qui le représentaient (MRP, SFIO, Radicaux). En effet, la destruction d'un grand nombre d'infrastructures au cours de la guerre rendait nécessaire aux yeux du patronat ce monopole public, susceptible de reconstruire au plus vite et sans objectif lucratif le réseau électrique nécessaire au fonctionnement de nombre d'entreprises capitalistes. Par la suite, l'existence de ce monopole public permit la mise en place d'un réseau de centrales nucléaires qui n'aurait sans doute jamais pu voir le jour si les entreprises d'électricité étaient restées privées.

Tout comme le patronat belge à l'époque de Léopold III avait créé un monopole public sur le rail pour rattraper son retard sur les autres pays impérialistes, EDF fut utilisée par les capitalistes français qui détenaient les rênes de l'Etat pour remettre en fonction au plus vite le réseau électrique après la guerre, puis mettre en place un réseau électrique fonctionnant grâce à l'énergie nucléaire. Mais dès 1996, la bourgeoisie européenne a choisi d'ouvrir à la concurrence le marché de l'électricité. Le statut public d'EDF a ainsi changé en 2004, passant d’un EPIC (Établissement public à caractère industriel et commercial) à une SA (Société anonyme). Privatisée à 20 %, en 2005 elle est même cotée en bourse afin de permettre aux spéculateurs d'en tirer directement profit. Cependant, cette « libéralisation » n’a pas réussi à cette entreprise spécialisée dans des projets coûteux mais pas forcément lucratifs (on peut penser par exemple à la centrale de Flamanville). En 2015, le titre EDF a perdu 40 % de sa valeur et a été retiré de l'indice du CAC 40, mais ce sont les travailleurs qui ont payé le prix fort de la privatisation et de l’aventurisme financier d’EDF, puisque 3.500 postes ont été supprimés !

Présenté fin 2020 par le gouvernement comme un simple plan de réorganisation avec une touche de « capitalisme vert », le projet Hercule est en réalité la continuité logique de la stratégie de privatisation d’EDF. Il prévoit en effet de la scinder en trois entités qui, regroupées dans une holding sous forme de filiales indépendantes, pourraient se faire concurrence et être facilement cessibles. D'une part, « EDF Vert » regrouperait les entités les plus profitables (les énergies renouvelables, qui comprennent la petite hydraulique, l’éolien, et le photovoltaïque, les réseaux électriques Enedis et SEI) et serait largement ouvert aux investisseurs privés, friands des revenus récurrents et sûrs. D’autre part, « EDF Bleu » comprendrait les entités sensibles nécessitant d’investissements lourds comme le nucléaire et resterait 100% public. Enfin, « EDF Azur » serait une filiale d’EDF Bleu et aurait la charge des barrages hydroélectriques dont les concessions seraient remises en concurrence.

Ainsi le gouvernement entend appliquer à EDF aussi la tristement célèbre logique de « socialisation des pertes et privatisation des profits », ayant déjà ravagé notamment le service public du rail. Les capitalistes pourront en effet s'enrichir grâce aux filiales rentables d’EDF, tandis que la dette importante engendrée par sa filiale nécessaire mais non rentable sera assurée par l'Etat, donc par le contribuable. Une réforme de la régulation du parc nucléaire existant (projet dit ARENH – Accès régulé à l'électricité nucléaire historique) a été introduite en tant que corollaire du projet Hercule, afin de garantir la couverture des coûts d’EDF Bleu. Toutefois, elle ne règle en rien la faiblesse endémique des fonds propres d'EDF depuis sa transformation de 2004, alors même que l’entreprise va devoir investir dans la décennie qui vient près de 100 milliards d'euros dans le système électrique français.

Comme l’ont souligné nos camarades de la FNME CGT, le projet Hercule a été élaboré par des banques d’affaires, à la demande de la direction d’EDF, afin de répondre aux préconisations de l’Union européenne en matière d’ouverture à la concurrence et de démantèlement des services publics. En introduisant en Bourse la partie la plus rentable de l’entreprise (EDF Vert) et en préparant la cession future des barrages électriques, ce projet s’apparente à un schéma purement financier et vise à spolier un bien public sans envisager la moindre amélioration du service rendu à la collectivité nationale. Non seulement les tarifs augmenteraient significativement mais ils pourraient également être différents dans chacune des nouvelles sociétés privées, ce qui risquerait de marquer la fin du tarif unique au niveau national et donc la fin de l’égalité de traitement des ménages : les ruraux en seraient les premières victimes.

Les impératifs du service public (fourniture d’électricité 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 en tous points du territoire quels que soient les aléas climatiques) pourraient ne plus être garantis. Pourtant, selon l’article L. 100-1 du Code de l’énergie, la politique énergétique de la France doit, notamment, garantir « la cohésion sociale et territoriale en assurant un droit d’accès de tous les ménages à l’énergie sans coût excessif au regard de leurs ressources » et permettre de « lutter contre la précarité énergétique ».

Tous les syndicats d'EDF, et notamment la CGT, ont manifesté immédiatement leur opposition au projet Hercule. Plusieurs journées d’appel à la mobilisation et à la grève ont déjà été très suivies depuis le mois de novembre. Mais la bourgeoisie entend tout mettre en œuvre pour imposer son projet : il risque en effet d’être adopté par voie d’ordonnance, passant outre ne serait-ce qu’un faux-semblant de débat parlementaire. Un nouvel appel à la grève a été lancé pour aujourd’hui, mardi 19 janvier, afin de riposter à l’offensive bourgeoisie et imposer le retrait pur et simple de son projet Hercule. A cette occasion, nous réitérons notre soutien inébranlable aux salariés en lutte contre le démantèlement du service public de l’électricité !

Non au Projet Hercule ! Non à la privatisation d'EDF !

Pour un service public de l'électricité géré démocratiquement par les travailleurs !

Pour la révolution et le socialisme, organise ta colère !

Jeunes Communistes du Bas-Rhin

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